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Affaire de Rugy : Jacky Isabello décrypte la communication de crise du ministre sortant

Une semaine après les révélations de Mediapart, François de Rugy a annoncé  sa démission du ministère de la Transition écologique et solidaire. Jacky Isabello, cofondateur de l’agence Coriolink et administrateur du Think tank Synopia décrypte le 17 juillet pour la Revue Politique et Parlementaire, la communication de crise du ministre démissionnaire.  

 

Après une semaine intense rythmée par une polémique autour de la probité supposément entachée d’un ministre frappé en rafale par les révélations du nouveau censeur des bonnes mœurs républicaines ; atours dans lesquels se sont drapés les membres de la rédaction de Mediapartanimée par MM. Plenel et Arfi, le numéro 2 du gouvernement dirigé par Edouard Philippe s’est finalement agenouillé et a rendu les armes !

 

 

 

 

En admettant la nécessité de démissionner pour défendre son honneur et protéger sa famille, il faut également y voir une intention de ne pas dégrader l’image du gouvernement d’Emmanuel Macron encore en voie de guérison après sept mois d’une révolte en jaune et à la date anniversaire de l’affaire Benalla, cellule souche d’une communication dysfonctionnelle ayant engendré des accidents en cascade, lourds de conséquence dans un processus de fermentation qui conduisit à l’explosion de la crise des « gilets jaunes ».

 

Mediapart : le poids des mots, le choc des photos, la puissance des réseaux sociaux

 

La communication de crise dans l’univers politique a changé de paradigme. Les acteurs devront s’y préparer pour ne pas mourir. Replay : jeudi 11 juillet à 10h sur LCI Fabrice Arfi, journaliste à Mediapart, commente les images de ce qui restera dans les mémoires comme l’affaire des homards.

 

« Il nous interpelle en assénant que M. de Rugy a servi des homards géants. Ce qualificatif est-il nécessaire pour établir la culpabilité du ministre à propos de dîners luxueux servis à des invités dont on ne sait toujours pas s’ils appartiennent au cercle professionnel ou privé du représentant du gouvernement ? Peu importe, il démontre une chose essentielle à qui souhaitant devenir un jour ministre ».

Désormais les médias publient des enquêtes, source de la monétisation de leur modèle économique, et les défendent bec et ongle comme des agences de communication et d’influence. Et alors !

 

L’analyse sémiologique de l’attaque fulgurante lancée par Mediapart accrédite cela. Aux mots, choisis, ils conjuguent des images, le homard et de fameux breuvages. Celles-ci elles-mêmes fantasmées par l’évocation des prix délirants de ces mets délicieux. Enfin, l’entreprise qui pourrait bientôt devenir une Fondation d’intérêt public, soutient l’engagement des opinions publiques sur ce dossier en s’impliquant sans réserve dans les médias mainstream mais aussi sur les réseaux sociaux.

 

Les enquêtes de Mediapart sont comme des films, les acteurs en font la promotion. En matière de communication de crise ce point est essentiel et tout à fait nouveau. Auparavant, les médias publiaient des informations et laissaient d’une part les commentaires se construire et d’autre part la justice se saisir des révélations autant que de besoin.

 

« Mediapart est au journalisme ce que les forces spéciales sont à « l’armée à la papa » enfouie dans des tranchées. D’un nouveau genre sur un nouveau terrain de l’information et de la communication essentiellement digitales (autonomes, rapides, furtives, dans un contexte hautement hostile, effectif réduit contre des adversaires nettement plus nombreux, techniques et tactiques particulières dans le but d’exploiter les points faibles de l’ennemi et d’en tirer un avantage décisif) »1.

Une gestion de l’alerte hasardeuse

 

En communication de crise, lorsque le dossier revêt des aspects touchant à la morale, les méthodes américaines nous ont appris que la personne « mise en examen médiatique » ne dispose que de quelques heures pour construire son personnage auprès des différentes opinions publiques. Soit elle est perçue comme une victime, soit elle est jugée prématurément coupable (Victim or Villain en anglais). L’approximation des éléments de langage utilisés par M. de Rugy, dans les premières heures de la crise, ont offert le portrait de quelqu’un peu à l’aise dans ses justifications donc forcément coupable. Nos concitoyens se sont demandé comment un élu de la République pouvait justifier de telles agapes par le besoin de : « rester connecté à la vraie vie ».

 

Retrouvez ici en intégralité la tribune de Jacky Isabello